Poupées funéraires Bembe 

Numéro d’inventaire : MAAM.2017.14.1

Ce reliquaire, nommé Muzidi, est originaire de la République Démocratique du Congo et plus précisément de l’ethnie Bembe.

Dans les traditions Bembe, les ancêtres tiennent une place importante et il est important de les honorer en confectionnant ces poupées funéraires, appelées Muzidi. Ces artefacts sont des reliquaires anthropomorphes de textile qui assurent la protection, ainsi que l’unité de la famille ou des membres de la communauté autour d’un ancien esprit en cas de besoin, par la conservation et la préservation des reliques, telles que les ongles, les cheveux et la peau, d’un défunt réputé puissant, comme un chef respecté, un sage sage ou une femme féconde.

L’obtention des reliques est effectuée par un devin-guérisseur nommé nganga, après l’inhumation, lors de la cérémonie Kitu où le corps est exhumé. Le délai entre l’inhumation et l’exhumation peut varier de quelques jours à un an.
Ces reliquaires Bembé sont apportés au nganga et peuvent être fabriqués à l’avance et vendus, ou fabriqués à la demande de la famille ou du défunt lui-même. Les muzidis sont généralement composés d’une armature en bois et d’un rembourrage à base de feuilles de bananier, de fibres et de lianes. Les Bembé Muzidi sont ornés de perles et ornés de colliers et confectionnés avec du tissu rouge ou bleu, d’origine européenne. L’utilisation de matériaux importés a ajouté un certain prestige au Muzidi, ce qui est un moyen d’honorer davantage le défunt, mais aussi d’assurer la protection de la lignée familiale ou de la communauté. L’importation de matériaux d’autres régions d’Afrique, comme le velours du Kasaï, est également honorifique pour le défunt et utilisé pour la fabrication Muzidi. Ces effigies doivent pouvoir bouger car ses mouvements sont interprétés comme une réponse à une question posée.

Le Muzidi MAAM.2017.14.1 est en position assise avec la tête orientée vers le bas, les membres supérieurs et inférieurs tendus et joints aux extrémités. Composé de tissu marron, avec des parties en ocre foncé pour la tête et pour deux revêtements au niveau du bras gauche et du dos. Différentes parties représentant les bras, le torse et les jambes sont cousues les unes aux autres. Seul un collier en paille tressée, ressemblant à une corde, est apposé en guise d’ornementation. La bouche et les oreilles sont représentées par un tissu enveloppant cousu sur la surface de la tête. Certaines applications similaires aux attributs sexuels sont observées au niveau de la poitrine et de l’entrejambe.

Un examen radiologique réalisé en 2015 a révélé la présence de nombreux objets indéterminés insérés dans le remplissage du Muzidi. La fermeté du Muzidi et la morphologie du garnissage observées lors du CT-Scan nous montrent qu’il ne peut s’agir d’un garnissage en coton, mais la rigidité et son aspect fibreux confirment la présence potentielle de feuilles et de lianes. Enfin, les images CT-Scan n’ont montré aucune armature en bois. Les images CT-Scan montrent un remplissage végétal rigide et la présence d’éléments à l’intérieur du remplissage. Si les dimensions réduites empêchent une reconstitution 3D, la faible densité et la morphologie de ces dépôts dans le comblement excluent l’hypothèse d’éléments osseux ou métalliques. Cependant, il peut s’agir de clous ou de petits objets appartenant au défunt. Par ailleurs, si la présence potentielle de cheveux ne peut être distinguée, elle ne peut cependant pas être exclue.

Lors de cette étude, un rapprochement a été fait entre la position et la couleur du tissu du Muzidi et les poupées funéraires des Fali, peuple du Nord-Cameroun appartenant au grand groupe Kirdi. Plusieurs similitudes lient les deux traditions : l’utilisation de tissus ternes et l’absence d’ornementation, à l’exception de quelques cauris pour former le visage ou la coiffe. La position du Muzidi rappelle également la posture défunte des sépultures Fali, nommées gébus (9). Ces similitudes peuvent faire allusion à la possibilité d’échanges commerciaux entre les groupes Fali et Bembé, peut-être avec l’achat et la réutilisation d’une poupée Fali par un nganga Bembé. Cette hypothèse d’échanges commerciaux est renforcée par la présence de tissu ocre foncé aux emplacements exacts des éléments, observés au CT-scan, dans le remplissage. Ainsi, le nganga Bembé pouvait acheter une poupée funéraire au peuple Fali, en faisant peut-être des ouvertures dans le tissu ou en changeant la tête pour insérer des reliques du défunt à l’intérieur du rembourrage. Compte tenu de l’absence d’éléments à l’arrière (où un revêtement est présent), on peut imaginer que le but de cette ouverture était d’insérer des cheveux ou des reliques non visibles au CT-Scan, ou de changer une partie du remplissage.

Retrouvez la publication associée à cette étude ici.

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